Toprak Razgatlioglu en MotoGP : quelles seront les conséquences ?

Extrait de cet article : post publié sur Motorsport.com

Après de multiples spéculations sur le sujet, plusieurs rapprochements aussitôt suivis de retours en arrière, cette fois, ça y est : Toprak Razgatlioglu va rejoindre le MotoGP. Star en Turquie et dans le paddock WorldSBK, le pilote d’Alanya, qui fêtera ses 29 ans à l’automne, avoue réaliser un rêve en signant la fin de son glorieux parcours en dérivées de la série pour relever le défi ultime, celui des Grands Prix.

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Recruter Razgatlioglu est loin d’être une décision ordinaire de la part de Yamaha, la marque avec laquelle il a remporté son premier titre WorldSBK, en 2021. On ne peut pas dire qu’il s’agisse d’une nouvelle surprenante, d’abord du fait de sa relation étroite avec Paolo Pavesio, le nouveau responsable de la division course de Yamaha, qui a remplacé Lin Jarvis cet hiver.

Cela avait immédiatement suscité des spéculations dans les deux paddocks sur le fait que le Turc pourrait se laisser convaincre de faire le grand saut. L’acquisition imminente de Dorna par Liberty Media a sans doute fini de le convaincre, le géant américain ayant les moyens d’amplifier l’exposition médiatique et la popularité du MotoGP, déjà bien plus larges que ce que Razgatlioglu connaît en Superbike.

Mais l’arrivée de Razgatlioglu n’a rien de conventionnel, et la façon dont la nouvelle a été annoncée l’a clairement montré. C’est Yamaha Europe et l’équipe MotoGP qui l’ont officialisé, par le biais d’une communication commune. Le communiqué de presse présentait un détail saisissant : le logo Monster, principal sponsor de l’équipe Yamaha (dans laquelle courent Fabio Quartararo et Álex Rins), contrastait avec la casquette Red Bull portée par Toprak Razgatlioglu sur la photo.

Toprak Razgatlioglu a remporté le titre WorldSBK avec Yamaha, en 2021.

Toprak Razgatlioglu a remporté le titre WorldSBK avec Yamaha, en 2021.

Photo de: Gold and Goose Photography / LAT Images / via Getty Images

En Turquie, le double champion WorldSBK est une icône nationale majeure ainsi que l’image de marque de Red Bull. Le fait que l’accord annoncé pour 2026 le mène chez Pramac évite tout conflit de sponsoring, puisque l’équipe de Paolo Campinoti n’a aucun lien avec Monster. Dans les deux pilotes actuels figure d’ailleurs Miguel Oliveira, qui est lui-même un athlète Red Bull, au contraire de Jack Miller, qui est sponsorisé par Monster.

Les choses pourraient toutefois se compliquer pour Toprak Razgatlioglu s’il devait être promu dans l’équipe d’usine Yamaha en 2027, et à condition que celle-ci soit alors toujours liée à Monster, la durée de leur accord n’ayant pas été divulguée lors du dernier renouvellement, en 2022.

Si la question devait se poser, le pilote turc se retrouverait dans une situation comparable à celle qu’a connue Marc Marquez l’hiver dernier. Et si l’octuple champion du monde a renoncé à son statut d’ambassadeur Red Bull pour intégrer l’équipe d’usine Ducati, partenaire de Monster, il n’est pas exagéré de penser que Razgatlioglu pourrait faire un sacrifice similaire.

Qui fera les frais de l’arrivée de Razgatlioglu ?

Avant même de penser aux questions d’image, il y a un premier point à clarifier, celle de la place que prendra Razgatlioglu en intégrant le championnat. On sait qu’il courra chez Pramac la saison prochaine, mais avec quel coéquipier ?

Sur le papier, on peut penser que Jack Miller est sur un siège éjectable, puisqu’il n’est sous contrat que pour cette année, alors que Miguel Oliveira a signé jusqu’en 2026 inclus. Cependant, d’après les informations de Motorsport.com, Yamaha est très satisfait de l’apport de l’Australien, pas tant pour ses résultats bruts sachant qu’il occupe la 16e place du classement (à égalité de points avec Álex Rins), mais pour ses commentaires techniques. L’usine d’Iwata serait tellement satisfaite qu’elle pourrait lui proposer de renouveler son contrat.

Jack Miller et Miguel Oliveira, le duo de Pramac Racing en 2025.

Jack Miller et Miguel Oliveira, le duo de Pramac Racing en 2025.

Photo de: Pramac Racing

Les deux pilotes Pramac actuels ont en tout cas été informés qu’ils avaient jusqu’à la pause estivale pour gagner leur place pour 2026, eux qui ont découvert la M1 cette saison. Une échéance également évoquée publiquement par Yamaha lorsque les spéculations entourant Razgatlioglu se sont faites plus fortes, Paolo Pavesio ayant alors affirmé qu’il ne serait pas juste de signifier à l’un ou l’autre des pilotes la fin proche de son aventure, et ce d’autant moins qu’Oliveira a été blessé.

Le défi ultime pour Toprak Razgatlioglu

Talent reconnu en dérivées de la série, de ses premiers pas fracassants en Supersport 600 jusqu’à la catégorie WorldSBK où il a couru pour trois marques, remporté deux titres et assez de victoires pour être à la tête du deuxième plus gros palmarès de l’histoire, Razgatlioglu est maintenant confronté au plus grand défi de sa carrière.

Il va devoir s’adapter non seulement à un type de machine complètement différent – un prototype beaucoup plus rapide et rigide qui pardonne beaucoup moins les erreurs – mais aussi aux pneus Michelin. Sur ce dernier point, il ne vivra ce changement que pour un an puisque Pirelli prendra le relais du manufacturier clermontois en 2027, une marque que le Turc connaît bien.

De ce point de vue, l’arrivée de Razgatlioglu dès 2026 peut surprendre, en comparaison de l’accord obtenu par Nicolò Bulega (son rival aujourd’hui) avec Ducati et qui permettra à l’Italien de tester en 2026 la MotoGP répondant au règlement 2027 tout en courant encore un an en WorldSBK. Une option sans doute plus sûre, mais que Razgatlioglu, d’après nos informations, n’a pas réussi à obtenir avec Honda.

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Le courage de Toprak ne fait aucun doute, qu’il s’agisse de ses performances sur la piste ou de ses décisions audacieuses en dehors de la moto. Devenir rookie en MotoGP à 29 ans, sur une machine qui à l’heure qu’il est, est loin de rivaliser avec le niveau des Ducati, est un nouvel exemple de ce courage. Il sera toutefois soumis à une pression qu’il n’a jamais connue, dans un paddock où ses rivaux l’attendront de pied ferme et où nombreux sont ceux qui veulent voir s’il peut être à la hauteur de l’engouement qu’il suscite.

“La façon dont il abordera le défi fera toute la différence. S’il se fixe pour objectif de courir immédiatement avec les premiers, cela pourrait se retourner contre lui”, nous explique un acteur du paddock qui a récemment travaillé avec le pilote turc. “Pour lui, le succès réside dans une progression constante tout au long de la saison, afin de terminer l’année 2026 dans une position bien plus forte que celle où il l’aura commencée.”

Toprak Razgatlıoglu, ici avec Cal Crutchlow, a fait deux tests en MotoGP avec Yamaha ces dernières années.

Toprak Razgatlıoglu, ici avec Cal Crutchlow, a fait deux tests en MotoGP avec Yamaha ces dernières années.

Toprak Razgatlioglu devra être bien entouré pour réussir cette aventure. Il est indissociable de l’ancien pilote Kenan Sofuoglu, son manager, qui va lui aussi passer un cap dans les affaires à gérer une fois tous deux arrivés en MotoGP. On ignore pour le moment si Phil Marron, son actuel chef mécanicien, accompagnera également le pilote turc en MotoGP.

“Phil est excellent sur le plan psychologique et pourrait jouer un rôle clé en aidant Toprak à se concentrer sur l’apprentissage”, nous explique notre interlocuteur, “car le niveau d’intensité en MotoGP est différent de tout ce qu’il a connu. Ce qu’il doit absolument éviter, c’est de laisser la pression le pousser à se sentir obligé de prouver quelque chose.”

Ce sentiment est partagé par un membre de l’équipe aujourd’hui rivale de Razgatlioglu et qui connaît bien les deux paddocks. “C’est un type formidable et un pilote incroyable. Mais pour être honnête, je ne pense pas qu’il se rende compte de ce qui l’attend”, nous avoue-t-il. “Le niveau d’hostilité en MotoGP est quelque chose qu’il n’a pas vu en Superbike.”

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Dans cet article

Oriol Puigdemont

MotoGP

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